Grâce à l’évolution de notre société, l’espérance de vie à la naissance ne cesse d’augmenter. Cette longévité permet à nos aînés de vivre plus longtemps, mais encore faut-il leur permettre de le faire dans de bonnes conditions.
Parce que la perte d’autonomie touche tout le monde à partir de 65 ans et qu’elle coûte cher, nous pensons que l’assurance dépendance peut leur permettre d’accéder aux soins et équipements dont ils ont besoin pour vivre le plus longtemps chez eux et dans de bonnes conditions.
Malheureusement, cette solution est méconnue et insuffisamment développée, c’est pourquoi nous pensons que des mesures d’incitation fiscale pourraient inverser la tendance et assurer à tous, une bonne prise en charge en cas de dépendance.
La dépendance : une réalité qui a un coût
Selon les dernières estimations de l’INSEE, la population française devrait dépasser les 73 millions d’habitants d’ici 2060, un tiers aura plus de 60 ans. Cette forte augmentation du nombre de seniors correspond à l’arrivée des baby-boomers dans le troisième âge et laisse présager une croissance du nombre de personnes en perte d’autonomie.
Il est donc important de comprendre, dès aujourd’hui, que cela aura un coût financier et humain, et qu’il sera supporté par les familles et l’État.
Un risque inquiétant et cher pour les Français
La dépendance est source d’inquiétudes pour 77% des Français car elle est synonyme de perte de capacité, de maladies, mais aussi d’isolement et de dépenses. Malheureusement, ces craintes sont fondées. Avec un coût moyen compris entre 2 000 et 3 000 € par mois, la prise en charge de la perte d’autonomie dépasse souvent les revenus des plus âgés. Malgré les aides de l’État, ils sont de plus en plus nombreux à devoir demander de l’aide à leurs proches.
Ces proches sont les aidants familiaux, ils sont 4.3 millions à s’occuper des papiers, des courses, des repas, mais aussi de la toilette et des soins de leurs parents dépendants. Cet engagement leur coûte cher (entre 2 000 et 3 000 € par an) et les plonge dans la précarité puisque 75 % d’entre eux sont contraints à réduire ou cesser leur activité professionnelle.
Un coût important pour l’État et la collectivité
Avec un poids de 21 milliards d’euros enregistrés en 2010, il est difficilement envisageable qu’un financement public soit capable, à lui seul, de supporter la charge de la perte d’autonomie des baby-boomers. Pour faire face aux besoins de demain, l’État réfléchit à différentes manières de réformer le système de prise en charge de la dépendance et nous souhaitons le soutenir dans sa démarche.
Le gouvernement semble aujourd’hui prêt à aborder la création d’un cinquième risque à la sécurité sociale. Ce dernier garantirait à tous un accès aux soins en cas de perte d’autonomie et compléterait les aides sociales déjà en place, comme l’Allocation Personnalisée d’Autonomie (APA).
De notre côté, nous pensons que la prise en charge de la dépendance ne doit pas reposer uniquement sur des mesures publiques. Il faut que chacun prenne conscience que l’État ne peut pas et ne pourra pas payer seul la facture de la perte d’autonomie. Il faut que chaque citoyen puisse se mobiliser, investir dans des dispositifs assurantiels afin d’assurer au maximum son indépendance vis-à-vis des aides de sociale et les réserver à ceux qui en ont le plus besoin.
Aussi, il est important que les assurances dépendance soient développées et soutenues par les pouvoirs publics, qu’elles soient souscrites à titre individuel ou collectif.
Pourquoi rendre déductible l’assurance dépendance ?
D’après un récent sondage Harris Interactive, les Français se disent intéressés par l’assurance dépendance. Pourtant, dans les faits, seuls 21 % pensent réellement y souscrire. Cette retenue peut en partie s’expliquer par la méconnaissance de ces produits mais aussi par le fait qu’ils paraissent comme un dispositif à perte puisque la rente ou le capital n’est versé qu’en cas de dépendance.
Nous pensons à ce titre que les primes et cotisations gagneraient à être déductibles de l’impôt afin de constituer un gain immédiat pour le souscripteur et un investissement pour la collectivité.
Des avantages à court et long terme
En dehors des arguments de protection volontaire contre le risque de dépendance, l’idée de rendre obligatoire l’assurance dépendance est intéressante aussi bien pour les particuliers, les pouvoirs publics et les assureurs. En effet, il rassurerait sur une prise de conscience collective de ce risque, mais aussi sur l’engagement possible de toutes les parties prenantes (pouvoirs publics, entreprises et particuliers).
De plus, à court terme, les particuliers pourront bénéficier d’avantages immédiats en terme de fiscalité, même lorsque le risque ne se réalise pas, ce qui n’est pas le cas actuellement. Sur le long terme, cette solution est également profitable aux pouvoirs publics dans le sens où elle leur permet de développer des offres de services ou d’aides qui viendront en complément de ces contrats sans avoir à porter seuls la charge de la dépendance. Ce dispositif permet également de concentrer davantage l’aide publique sur les plus modestes, ceux qui sont déjà dépendants, ou ne pourront pas souscrire à ce type de contrat en fonction des modalités qui lui sont appliquées.
Cette mesure d’équité permettrait à tous de vieillir dans la dignité et d’avoir un égal accès aux soins.
La règle et ses exceptions
Cette idée de rendre déductible l’assurance dépendance a été proposée pour la première fois en 1998. Depuis, et malgré les sollicitations des différents bords politiques, ces 20 dernières années ont été rythmées par des refus au principe d’une seule règle : les primes ou cotisations versées dans le cadre de contrats d’assurance dépendance répondent au grand principe qu’elles constituent des dépenses de prévoyance effectuées à titre facultatif, un emploi de revenu d’ordre personnel, consenti librement par le contribuable, qui n’ouvre par conséquent pas droit à une déduction du revenu imposable.
Cet argument revient de manière systématique depuis 1998 jusqu’à nos jours. Pourtant, en cherchant parmi les dispositifs de déductions fiscales, nous remarquons rapidement qu’il y a déjà eu un précédent sur la question et des exceptions.
En effet, depuis la loi de 2003, afin d’encourager la constitution d’une épargne retraite, un avantage fiscal sur le PERP a été mis en place sous la forme d’une déduction des cotisations versées. Ce contrat ouvre droit à une rente viagère à compter de l’âge de la retraite. Il agit donc d’une sorte d’assurance.
La question est maintenant de savoir pourquoi l’assurance dépendance ne serait pas déductible alors que l’assurance retraite l’est ?
Nous pouvons également constater des mesures fiscales sur des dépenses éminemment personnelles et ne répondant à aucun impératif national ou de santé publique.
Ainsi, une réduction d’impôt sur le revenu est accordée sur les dons et cotisations à un organisme d’intérêt général (association) et sur les dons aux partis politiques. Si ce don doit être fait sans contrepartie, il semble évident que le soutien à une cause, à une association ou à un parti politique constitue une dépense personnelle, facultative et librement consentie et par conséquent ne devrait pas faire l’objet de réductions fiscales. Saviez-vous que ces dernières s’élevaient pourtant à 66 % du montant des dons dans la limite de 15 000 € par an et que l’excédent était reportable sur 5 ans ?
Si l’affirmation de son opinion politique peut être déduite des impôts, pourquoi n’en serait-il pas de même pour les dispositifs visant à s’assurer les moyens de vieillir dans de bonnes conditions ?
Nos aînés bénéficient de l’allongement de l’espérance de vie mais sans pouvoir vieillir dans de bonnes conditions, faute de moyens. De nombreux pays doivent, comme nous, faire face à une transition démographique compliquée et certains ont même déjà pris des mesures au travers de cotisations obligatoires.
Cette idée tend à se faire une place en France comme l’atteste la proposition émise début avril 2019 par des Sénateurs LaReM, à savoir la mise en place d’une cotisation de 12 € par mois dès l’entrée dans la vie active pour une rente mensuelle de 500 €, en cas de perte d’autonomie.
Pendant que l’État cherche encore le moyen de contourner le problème, nous proposons la déductibilité de l’assurance dépendance car nous sommes persuadés qu’il s’agit d’une solution réelle et profitable à l’ensemble de la société. Il faut que chacun prenne sa part dans le financement de ce risque et soit encouragé à le faire.